Le Combat de Carnaval et de Carême
Ce tableau peint à l’huile par Pieter Brueghel l’Ancien en 1559, représente la fête du combat entre les figures de Carnaval et de Carême. C’était un événement important dans l’Europe du XVIe siècle, représentant la transition entre deux temps spirituels : le Mardi Gras et le Mercredi des Cendres, mais aussi entre deux saisons culinaires : celle avec viande et celle sans viande – donc avec poisson. En effet, la fête de Carnaval est avant tout « l’adieu à la viande » (Carnaval vient des mots « carne » = la viande et « vale » = adieu). Le jeûne du Carême permettant de se préparer et se purifier en vue de la fête de Pâques (où la viande et les œufs pouvaient réapparaître – d’où les « œufs de Pâques »), il excluait la consommation de viande : les bouchers fermaient donc leur échoppe pendant 40 jours et préparaient à la campagne leurs troupeaux pour le printemps.
Souvent compris comme le triomphe de Carême : le gros personnage qui incarne Carnaval a les yeux levés au ciel et semble dire au revoir par sa main levée, comme pour saluer et se retirer. Cette interprétation semble cohérente dans la mesure où le Carême succède au Carnaval dans l’ordre chronologique des fêtes.
De manière plus symbolique, le tableau peut s’interpréter comme le partage de la société villageoise flamande entre deux tentations distinctes :
– la vie tournée vers le plaisir, dont le centre est l’auberge située à gauche du tableau ;
– l’observance religieuse, dont le centre est la chapelle à droite du tableau.
Mais aussi entre deux religions s’opposant en 1559 : le protestantisme, qui fait fi du Carême, et le catholicisme, qui le respecte. Notons néanmoins que le « combat » entre les deux défilés de chars est dépourvu d’agressivité. Il pourrait s’agir davantage ici du respect des temps religieux : Carnaval semble laisser place à Carême, comme les festivités liées à la célébration du Carnaval laissent place à celles liées au Carême dans le déroulement de l’année.