Pieter Brueghel (l’Ancien) naît entre 1525 et 1530 dans un village des Pays-Bas espagnols, près de Breda. Il aurait pris le nom de son village, dont il a ôté une lettre.
Il va initier une lignée de peintres. Il a deux fils, Pieter Brueghel le Jeune, dit Brueghel d’Enfer et Jan Brueghel l’Ancien, dit Brueghel de Velours. La famille compte d’autres peintres célèbres : Pieter Brueghel III et Jan Brueghel II, petits-fils de de Brueghel, ainsi que Jan van Kessel, arrière-petit-fils du peintre et père de Ferdinand de Kessel et Jan van Kessel II, peintres baroques flamands.
Considéré comme l’un des grands maîtres de la peinture flamande avec Van Eyck, Bosch et Rubens, il fait son apprentissage dans un atelier d’Anvers. Il intègre en 1551 la Guilde de Saint-Luc (corporation de peintres, sculpteurs et imprimeurs dont le nom fait référence à saint Luc l’évangéliste, le saint patron des peintres). Graveur, puis marchand d’estampes, il commence à peindre assez tardivement.
Il sera un peintre atypique, très éloigné des ambitions de l’art de la Renaissance italienne : plutôt qu’une idéalisation de la beauté antique, il montre une représentation réaliste de la vie paysanne. Grand maître d’un genre considéré à l’époque comme inférieur aux scènes religieuses et mythologiques, c’est pourtant bien par sa proximité du peuple qu’il marque l’histoire de l’art.
Les Jeux d’enfants, huile sur bois de 116 × 161 cm, signé « BRVEGEL 1560 », représente 200 enfants (122 garçons et 78 filles) jouant à 91 jeux différents.
Le tableau surprend par son architecture – bâtiments aux lignes franches, perspective volontaire – et par le monde joyeux qui se décline dans tous les sens, celui de l’enfance. Étonnante animation dans un site urbain, envahi par deux cents enfants et dont l’adulte est banni, excepté une femme jetant un seau d’eau sur deux garçons qui se battent, comme on le ferait sur des chiens trop excités.
Si l’individu n’est pas mis en avant, une attitude, une expression font vivre les enfants et le mouvement naît d’une ligne, d’une forme, d’une tache de couleur.
Sur les jeux, le peintre s’en donne à cœur joie : plus de 200 gamins se livrent à des occupations toutes différentes, 91 activités répertoriées. Bien sûr, certains de ces jeux ont disparu, comme ce groupe qui joue à « Combien de cornes de bouc ? », en bas à droite de l’image. Mais bien d’autres sont encore pratiqués de nos jours. Et, si les enfants jouent, ils ne semblent pas vraiment s’amuser. Rien ne les distingue les uns des autres, et leurs visages aux yeux ronds arborent des expressions figées, sans joie. Brueghel s’applique à décrire les bambins et leurs jeux d’une manière encyclopédique. Il répétera souvent ce traitement dans son œuvre.
Mais pourquoi ces enfants sont-ils seuls ? La réponse réside peut-être dans ce marmot qui, dans la maison à gauche du tableau, se déguise avec un masque de carnaval : tout cela n’est peut-être qu’une immense mascarade. En observant de près les visages, on découvre que les enfants ressemblent à des adultes en miniatures. Certains jouent d’ailleurs à être grands. Voyez cette procession qui longe la barrière : ce sont des petits mariés ! Et là, près des fillettes aux osselets, un groupe mime un baptême. Brueghel aime dénoncer les travers de la société dans laquelle il vit. En montrant les jeux des enfants, il se moque aussi du monde des adultes qu’ils deviendront bientôt.